Au vu de la nouvelle condamnation de la Grèce par la Cour européenne des droits de l’homme pour les conditions inhumaines de détention dans les prisons (affaire Logothetis et autres c. Grèce), ainsi que de la restructuration radicale du droit pénal substantiel et du code de procédure pénale, la nécessité de décongestionner les prisons, sans causer de risques pour la sécurité publique et de dilemmes pour le sens de la justice du public, devient plus urgente et opportune que jamais, avec pour objectif ultime d’améliorer les conditions de vie des prisonniers de dégradantes à humaines.
Plus précisément, dans l’affaire Logothetis et autres c. Grèce, la CEDH a condamné la Grèce pour violation de l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme, selon lequel :
« Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. »
La Cour a ainsi jugé que les conditions de détention dans les prisons de Nauplie étaient inhumaines et dégradantes, portant atteinte au fondement même de la dignité humaine, principalement en raison de leur surpopulation, accueillant le recours de 16 prisonniers grecs, roumains, ukrainiens, turcs et américains, obligeant la Grèce à verser, à chacun des requérants, une indemnité comprise entre 5 000 et 15 000 euros et 2 000 euros conjointement pour frais et dépens.
Ces condamnations de la CEDH (voir également Nieciecki c. Grèce, détenu temporairement à la prison de Korydallos, ainsi que Tzamalis et autres c. Grèce, avec 14 requérants, emprisonnés à Ioannina) démontrent et enregistrent l’aveuglement ou l’indifférence volontaire de la société grecque à l’égard des questions de traitements et de punitions dégradants des êtres humains et de la violation répétée des droits fondamentaux de l’homme sous le couvert de la tolérance ou de la condescendance du pouvoir étatique institutionnalisé.
Selon les données officielles du ministère de la Justice, 12 703 détenus sont répartis dans 34 centres de détention à travers le pays, pour un total de 9 2861 places. La prison de Korydallos compte 2 270 détenus pour 1 070 places. La situation est similaire dans la plupart des établissements pénitentiaires du pays, comme par exemple le centre de détention de Thessalonique, qui compte 590 détenus pour 370 places.
Récemment, dans le but de désengorger les prisons, l'État a instauré, par la loi 4205/2013, l'assignation à résidence avec surveillance électronique des prévenus, des condamnés et des prisonniers. Cette nouvelle institution d'exécution quasi alternative de la peine vise, comme l'indique explicitement l'exposé des motifs de la loi concernée, à « contribuer à la désengorgement des prisons par les condamnés déjà incarcérés, sans risque pour la sécurité publique 2 ».
En particulier, la surveillance électronique est prévue tant au stade pré-procès, comme condition restrictive précédant la détention provisoire, qu'au stade de l'exécution de la peine prescrite, comme peine quasi alternative volontaire complétant la célèbre libération conditionnelle. Le caractère volontaire de la surveillance électronique dissipe les doutes quant à sa compatibilité avec les exigences constitutionnelles de protection de la vie privée et de la dignité humaine, dans la mesure, bien entendu, où les aspects fondamentaux de la vie personnelle du détenu sont exemptés de surveillance, tandis que l'exclusion des auteurs de crimes particulièrement indécents de la possibilité d'être placés sous surveillance électronique (par exemple, viol, homicide volontaire) préserve l'équilibre entre la nécessité de décongestionner les prisons et la satisfaction du sens de la justice du public.
La surveillance électronique en tant que condition restrictive vise à remplacer la détention temporaire de sorte qu'elle soit imposée comme mesure de dernier recours absolu de coercition procédurale, tandis qu'en tant que mode alternatif d'exécution de la peine, après en avoir purgé une partie au sein de l'établissement pénitentiaire, elle vise la transition progressive et en douceur du condamné du régime de privation de liberté à la vie sociale libre, le but ultime de ces deux manifestations étant la décongestion des prisons grecques et l'amélioration des conditions de vie des détenus.
Enfin, il convient de noter l'opinion contraire, minoritaire lors de la rédaction de l'exposé des motifs, selon laquelle l'ajout de nouvelles mesures pénales entraîne un phénomène d'élargissement du réseau de contrôle pénal (« net widening »). Selon cette thèse, les nouvelles mesures, au lieu d'être appliquées à une partie de la population carcérale, conduisant ainsi à sa décongestion, sont en pratique imposées à des personnes qui, sans ces mesures, n'y auraient pas été incarcérées, alourdissant ainsi le système pénitentiaire qu'elles visent à alléger.
En résumé, les nombreuses condamnations prononcées par la Cour européenne des droits de l'homme contre la Grèce, ainsi que les statistiques officielles sur la situation dans les prisons du pays, mettent en évidence les conditions de détention inhumaines et dégradantes, déjà connues, des détenus comme un problème contemporain d'importance sociale majeure, tout en révélant la position dégradée de la dignité humaine dans les valeurs de la société grecque moderne. Les mesures alternatives à l'exécution des peines et les conditions restrictives, telles que la surveillance électronique à domicile, visant à décongestionner les prisons et la prévention spéciale par l'incarcération de l'auteur, vont, selon l'auteur, dans la bonne direction, même si elles ne sont pas suffisantes à elles seules, car elles respectent simultanément la personnalité de l'auteur et la nécessité de satisfaire le sens de la justice du public. Seule la pratique quotidienne du mécanisme de répression pénale et du système pénitentiaire est en mesure de confirmer ou d'infirmer ces attentes, lesquelles doivent, à leur tour, intégrer le principe fondamental de la dignité humaine à leur système de valeurs.
Thomas Kalokiris